Comprendre l’acrophobie, la peur irrationnelle du vide
Définition et symptômes de l’acrophobie
L’acrophobie est une phobie spécifique qui se caractérise par une peur intense et irrationnelle du vide et des hauteurs, en l’absence de tout danger réel. Les personnes qui en souffrent ressentent une anxiété paralysante lorsqu’elles se retrouvent confrontées à des situations impliquant de la hauteur, comme se trouver sur un balcon, monter sur une échelle ou encore être dans un ascenseur.
Cette phobie touche environ 2 à 5% de la population française. Elle peut apparaître à n’importe quel âge, mais se déclenche le plus souvent pendant l’enfance ou l’adolescence, à la suite d’un événement traumatisant comme une chute.
Les principaux symptômes de l’acrophobie sont :
- Sensations de vertiges, nausées et malaises
- Tremblements et transpiration excessive
- Palpitations cardiaques et essoufflement
- Sensation d’étouffement ou de suffocation
- Sentiment de perte de contrôle et peur de tomber
- Pensées catastrophiques, comme celle de mourir
- Comportements d’évitement des situations de hauteur
Ces symptômes surviennent dès que la personne phobique est confrontée à la situation redoutée, que ce soit en vrai ou même simplement en l’imaginant. Ils peuvent conduire à des crises de panique particulièrement intenses, durant parfois plus de 30 minutes.
Causes et facteurs de risque de développer une acrophobie
Bien que les origines précises de l’acrophobie ne soient pas totalement comprises, plusieurs hypothèses existent pour expliquer le développement de cette phobie spécifique :
- Un événement traumatisant vécu dans l’enfance, comme une chute, même de faible hauteur, ou le fait d’avoir été témoin de la chute ou de l’accident de quelqu’un d’autre. Cela peut conduire à associer les grandes hauteurs à un danger extrême.
- Une prédisposition génétique. Même si les bases génétiques n’ont pas été prouvées, il semblerait que having a close relative avec une phobie spécifique puisse augmenter la vulnérabilité à développer la même phobie.
- Un déséquilibre au niveau des neurotransmetteurs cérébraux comme la sérotonine, impliquée dans la régulation des émotions et du stress. Un taux anormalement bas de sérotonine pourrait favoriser l’apparition de phobies.
- Le conditionnement classique. Si un stimulus anodin comme les hauteurs est associé de façon répétée à une réaction de peur intense, le cerveau peut finir par le percevoir à tort comme étant lui-même menaçant, déclenchant l’anxiété.
- Un vestige de l’évolution. La peur des hauteurs aurait pu servir de mécanisme de protection pour nos ancêtres, en les gardant éloignés des falaises et précipices. Elle serait donc inscrite dans nos gènes mais ne servirait plus de raison d’être aujourd’hui.
Quelle que soit son origine, l’acrophobie s’installe généralement progressivement, à force d’expériences négatives et déstabilisantes en hauteur, conduisant la personne à associer toute situation avec de la hauteur à quelque chose d’effrayant et de dangereux. Des facteurs environnementaux comme un entourage phobique ou surprotecteur peuvent aussi jouer un rôle.
Conséquences de l’acrophobie sur la vie quotidienne
Bien qu’irrationnelle, la peur du vide ressentie par les personnes souffrant d’acrophobie a un retentissement majeur sur leur qualité de vie. En effet, elles mettent en place des stratégies d’évitement pour ne plus avoir à affronter les situations qui provoquent leur anxiété.
Ces comportements d’évitement, s’ils soulagent temporairement l’angoisse, renforcent en réalité la phobie à long terme. Ils conduisent également à restreindre ses activités et ses déplacements de façon excessive.
Concrètement, une personne acrophobe peut rencontrer les limitations suivantes :
- Impossibilité de monter sur un escabeau pour changer une ampoule
- Refus de s’approcher du bord d’une falaise en randonnée
- Peur panique dans les ascenseurs ou téléphériques
- Incapacité à se rendre dans des lieux en hauteur comme la Tour Eiffel
- Evitement des ponts et des balcons sans protection
- Renoncement à certains métiers ou loisirs comme l’escalade
À terme, ces restrictions finissent par engendrer une perte d’autonomie et une altération de l’estime de soi. La personne acrophobe peut également développer d’autres troubles psychiques comme une dépression ou des conduites addictives. Il est donc crucial de traiter cette phobie spécifique.
Diagnostic et prise en charge de l’acrophobie
Comment diagnostiquer une acrophobie ?
Le diagnostic d’acrophobie repose sur un interrogatoire minutieux du patient par le médecin, idéalement un psychiatre ou un psychologue.
L’entretien vise à rechercher les 3 composantes cardinales permettant de caractériser une phobie :
- La peur : sentiment irraisonné de danger ou de catastrophe imminente lorsque la personne est confrontée à la situation phobogène, ici les hauteurs et le vide.
- L’évitement : mise en place de conduites d’évitement, parfois très invalidantes, visant à ne plus être exposé à l’objet redouté, donc aux situations en hauteur.
- La souffrance : retentissement significatif sur le quotidien, avec altération du fonctionnement socio-professionnel et de la qualité de vie.
Le médecin recherche également d’éventuels facteurs déclenchants ou traumatismes du passé qui auraient pu conduire au développement de cette phobie spécifique des hauteurs et du vide chez son patient.
D’autres explorations complémentaires comme des tests psychologiques ou un bilan biologique sont parfois réalisés pour éliminer un trouble anxieux généralisé ou organique à l’origine des symptômes.
Les différents traitements de l’acrophobie
Une fois le diagnostic d’acrophobie posé, plusieurs possibilités thérapeutiques existent pour venir à bout de cette phobie des hauteurs, en fonction de divers critères comme l’ancienneté de la phobie, sa sévérité, l’âge du patient ainsi que ses préférences.
La thérapie cognitivo-comportementale
La thérapie cognitivo-comportementale (TCC) est considérée comme le traitement de première intention de l’acrophobie. Elle permet d’obtenir une amélioration des symptômes en quelques mois seulement.
Son principe repose sur deux piliers :
- La rééducation cognitive : identifier et modifier les pensées et croyances erronées à l’origine des réactions de peur.
- La confrontation progressive à la situation redoutée : exposition graduée aux hauteurs, d’abord en imagination puis dans la réalité, afin de désamorcer l’anxiété.
Concrètement, le thérapeute commence par entraîner le patient à des techniques de relaxation et de contrôle des pensées négatives.
Il l’invite ensuite à s’imaginer en train d’affronter ses peurs, par étapes, tout en restant dans un environnement sécurisant. Par exemple, penser à se tenir sur unescabeau, puis sur une échelle, jusqu’à s’imaginer tout en haut de la Tour Eiffel.
Enfin, une fois son niveau d’anxiété sous contrôle, le patient est progressivement exposé à des mises en situation réelles impliquant des hauteurs croissantes. À chaque étape, le thérapeute l’accompagne et le félicite pour ses efforts afin de renforcer sa confiance en lui.
L’hypnothérapie et la EMDR
L’hypnothérapie ainsi que la méthode EMDR (mouvements oculaires de désensibilisation et de retraitement) sont également deux techniques qui ont démontré leur efficacité, seules ou en complément d’une TCC.
Grâce à un état de conscience modifié, l’hypnose permet de diminuer l’anxiété et d’atténuer les sensations de vertige ressenties en hauteur.
La méthode EMDR, quant à elle, désensibilise le patient face aux souvenirs traumatisants à l’origine de la phobie en utilisant des stimulations sensorielles alternées.
Ces deux approches permettent de désamorcer les réactions émotionnelles de peur et de détresse liées aux grandes hauteurs. Elles aident également à développer de nouvelles associations positives vis-à-vis des situations redoutées.
Les thérapies médicamenteuses
Dans certains de cas d’acrophobie sévère et invalidante, un traitement médicamenteux temporaire peut être envisagé en complément de la psychothérapie.
Les principales molécules utilisées appartiennent à deux grandes familles :
- Les antidépresseurs de type ISRS (inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine) comme la paroxétine, la sertraline ou l’escitalopram.
- Les tranquillisants de la famille des benzodiazépines comme le bromazépam, l’alprazolam ou encore le clonazépam.
Pris sur une durée de quelques mois, ils permettent de réduire les pics d’anxiété ainsi que l’intensité des réactions physiologiques de stress liées à la confrontation aux situations de hauteur.
Ils doivent cependant être maniés avec prudence en raison des risques d’accoutumance et de sevrage. Leur arrêt devra se faire progressivement une fois la thérapie psychologique bien engagée.
Quels sont les facteurs de bon pronostic ?
Plusieurs éléments permettent d’augurer favorablement de l’issue du traitement de l’acrophobie :
- Une prise en charge précoce, dès les premières manifestations
- L’absence de troubles psychiatriques associés comme la dépression
- Une bonne observance du traitement et de la thérapie
- Un entourage compréhensif et soutenant
- Une motivation élevée du patient à surmonter ses peurs
Bon à savoir : Même les cas les plus sévères d’acrophobie sont susceptibles de connaître une rémission complète ou quasi-complète avec un traitement adapté. Près de 80% des patients traités parviennent à mener une vie totalement normale après quelques mois à peine.
Vivre avec l’acrophobie : conseils et astuces au quotidien
En complément d’un suivi psychothérapeutique, certaines stratégies comportementales et cognitives peuvent vous aider à mieux gérer votre acrophobie et atténuer son impact dans vos activités quotidiennes.
Stratégies pour faire face à une crise d’anxiété
Lorsque vous vous retrouvez confronté à une situation de hauteur déclenchant chez vous une montée d’anxiété, voici quelques conseils pour traverser l’épreuve :
- Respirez profondément pour reprendre le contrôle de votre souffle et ralentir les battements de votre cœur.
- Mâchez un chewing-gum pour diminuer votre anxiété par un effet de distraction cognitive.
- Serrez dans votre main un objet apaisant comme une balle anti-stress pour vous raccrocher à la réalité.
- Fixez un point à l’horizon ou concentrez votre attention sur un détail précis de votre environnement pour éviter de regarder en bas.
- Dialoguez avec quelqu’un pour orienter votre focus mental sur autre chose que vos sensations vertigineuses.
- Pensez à une expérience positive vécue en hauteur pour combattre vos pensées catastrophiques par des souvenirs rassurants.
Vous pourrez petit à petit affronter des situations de plus en plus anxiogènes tout en contrôlant votre réaction de stress grâce à ces outils.
Modifier sa perception des hauteurs
Pour atténuer le sentiment de danger irrationnel que vous ressentez face aux hauteurs, vous pouvez également mettre en place les stratégies suivantes :
- S’entraîner à des jeux de réalité virtuelle avec exposition graduelle pour s’habituer en douceur.
- Regarder des vidéos apaisantes de paysages en hauteur, comme des vols d’oiseaux.
- Se focaliser sur sa respiration et ses sensations corporelles plutôt que sur la hauteur en cas de vertige.
- Imaginer un lieu rassurant comme sa pièce préférée pendant qu’on est confronté au vide.
En transformant votre perception de ces situations, vous arriverez à les vivre plus sereinement. Votre système nerveux apprendra à ne plus les considérer comme une menace.
Prévenir le déclenchement des crises
Enfin, mettez toutes les chances de votre côté en adoptant quelques réflexes préventifs :
- Dormez suffisamment car la fatigue augmente la sensibilité au stress.
- Maintenez une bonne hygiène de vie, avec une alimentation équilibrée et une activité physique régulière.
- Apprenez des techniques de relaxation et de méditation comme le yoga, la sophrologie ou la cohérence cardiaque, efficaces pour réguler ses émotions.
- Entourez-vous de personnes bienveillantes qui comprennent votre phobie et peuvent vous soutenir en cas de besoin.
- Gardez sur vous un anxiolytique naturel comme de l’élixir de fleurs de Bach en solution sublinguale à utiliser en cas de montée d’anxiété aiguë.