Comprendre le trouble dissociatif de l’identité
Le trouble dissociatif de l’identité (TDI), anciennement connu sous le nom de personnalités multiples, est un trouble mental caractérisé par la présence de deux ou plusieurs identités ou états de personnalité distincts chez un individu. Bien que controversé et souvent mal compris, le TDI est une réalité reconnue qui peut avoir des conséquences dévastatrices sur la vie des personnes qui en souffrent.
Les symptômes principaux
Les principaux symptômes du TDI sont :
- La présence d’altérations ou identités distinctes qui prennent le contrôle du comportement de façon involontaire et récurrente
- Des trous de mémoire importants concernant des informations personnelles de base ou des événements quotidiens
- La dépersonalisation et la déréalisation, des sensations d’être déconnecté de soi-même ou du monde extérieur
Ces symptômes peuvent être très perturbants et interférer de manière significative avec les relations interpersonnelles et le fonctionnement quotidien.
Les causes du TDI
Bien que les causes exactes du TDI ne soient pas entièrement comprises, les recherches suggèrent qu’une combinaison de facteurs est probablement en jeu, notamment :
- Des traumatismes infantiles graves et répétés, en particulier des maltraitances ou des abus
- Une prédisposition biologique ou génétique à la dissociation
- Certains troubles neurologiques ou psychiatriques sous-jacents
Chez les enfants vulnérables, des expériences traumatiques en bas âge, en particulier celles impliquant des soignants, peuvent conduire au développement d’identités dissociées comme mécanisme d’adaptation pour composer avec des émotions douloureuses.
Le diagnostic
Etant donné la complexité des symptômes, le TDI est souvent mal diagnostiqué ou confondu avec d’autres troubles comme la schizophrénie, le trouble borderline de la personnalité ou le trouble de stress post-traumatique complexe.
Un diagnostic précis repose sur :
- Des entretiens approfondis explorant l’histoire du patient et les changements de comportement
- Des évaluations psychologiques standardisées
- L’observation de changements soudains dans l’état mental, les maniérismes, le discours ou les sentiments rapportés par le patient
Il peut être nécessaire de consulter un spécialiste, tel qu’un psychiatre ou un psychologue clinicien, pour confirmer le diagnostic.
Vivre avec un TDI
Bien que le TDI soit considéré comme incurable, des traitements et des stratégies d’adaptation peuvent grandement améliorer la qualité de vie des personnes concernées. La psychothérapie, en particulier les thérapies d’intégration et de traitement du traumatisme, sont souvent bénéfiques.
Pour certains patients, apprendre à coexister avec leurs différentes identités devient une partie essentielle de leur cheminement vers le rétablissement. Cela peut impliquer des choses comme la tenue d’un journal, le dialogue interne, et la fixation de règles de base pour permettre à chaque identité de s’exprimer tout en maintenant la sécurité.
Le soutien des proches est également primordial. Prendre le temps de connaître les différentes identités d’un être cher atteint de TDI, respecter leurs besoins uniques et établir des relations positives avec chacune d’elles peut faire une réelle différence.
Mythes et réalités
Malgré une sensibilisation accrue, le TDI demeure très mal compris du grand public. Clarifions certains mythes et idées reçues :
- Mythe : Le TDI est extrêmement rare.
Réalité : Bien qu’il soit difficile à diagnostiquer, le TDI toucherait entre 1 et 3% de la population générale selon certaines études. - Mythe : Les personnes atteintes ont des personnalités « multiples » comme dans les films.
Réalité : Plutôt que des personnalités totalement formées, il s’agit d’états dissociatifs qui surviennent en réponse à des facteurs de stress. - Mythe : Le TDI est un trouble de la personnalité volontaire et conscient.
Réalité : Il s’agit bien d’un trouble psychiatrique involontaire nécessitant des soins, et non d’un choix ou d’une simulation.
Témoignages
Donner la parole à des personnes vivant avec le TDI permet de mieux saisir les complexités de ce trouble, derrière les stéréotypes.
Jeanne, 35 ans : « Comme si mon corps était habité »
Je vis avec un diagnostic de trouble dissociatif de l’identité depuis environ 5 ans. Au quotidien, j’alterne entre trois états de conscience principaux : Jeanne, Anne et Sophie. Nous avons chacune notre façon de percevoir le monde, nos propres souvenirs, nos forces et nos vulnérabilités.
Je compare souvent mon expérience à celle de partager mon corps et mon existence avec d’autres entités. C’est un sentiment très étrange lorsque l’une de mes altérations prend le contrôle, un peu comme si mon corps était « habitée » par quelqu’un d’autre pendant un certain temps. Heureusement, depuis le début de ma thérapie, j’ai beaucoup moins de trous noirs dans ma mémoire.
Bien que ce ne soit pas toujours facile, j’apprends petit à petit à mieux communiquer et collaborer avec Anne et Sophie. Ensemble, nous travaillons à accepter notre passé et à avancer vers un avenir plus serein.
Louis, 28 ans : « Comme si plusieurs personnes vivaient en moi »
J’ai reçu un diagnostic de trouble dissociatif de l’identité après des années de problèmes de santé mentale et d’instabilité. Ce qui m’a le plus surpris, c’est de réaliser que j’avais en moi différentes façons d’être que je ne contrôlais pas.
Il y a Louis, que je considère comme mon identité « principale », celle qui interagit avec le monde extérieur la plupart du temps. Mais il y a aussi Alex et Damien. Alex est très renfermé sur lui-même et craintif. Damien, lui, est plutôt rebelle et colérique. Chacun se manifeste sans que je puisse prédire quand ni pourquoi.
Vivre avec un TDI, c’est un peu comme si plusieurs personnes habitaient à l’intérieur de mon corps et prenaient tour à tour le contrôle. C’est déroutant mais avec de l’aide, j’apprends que nous pouvons coexister pacifiquement.
Pistes d’espoir
Malgré les défis, de nombreuses personnes atteintes parviennent à mener une vie épanouie en apprenant à composer avec leur trouble dissociatif.
Des traitements prometteurs
De nouvelles approches thérapeutiques telles que l’EMDR (intégration neuro-émotionnelle par les mouvements oculaires) ont démontré des résultats prometteurs chez certains patients. Combinée à des psychothérapies traditionnelles, l’EMDR pourrait aider à intégrer les souvenirs et identités dissociées.
La recherche sur les traitements médicamenteux et les interventions cognitives ou comportementales se poursuit également. Une meilleure compréhension des mécanismes neurobiologiques à l’œuvre chez les personnes atteintes laisse espérer de nouvelles pistes d’intervention.
Une sensibilisation accrue
Autrefois tabou, le TDI est de plus en plus documenté et représenté dans les médias et la culture populaire de manière réaliste, notamment à travers des témoignages de patients. Cela contribue à faire tomber les préjugés et à améliorer le soutien social envers les personnes concernées.
La force de la communauté
Grâce à internet, de nombreux groupes d’entraide et forums de discussion permettent désormais aux individus vivant avec un TDI de partager leurs expériences et de se sentir moins seuls. Sentir qu’on fait partie d’une communauté est souvent libérateur.
Bref, même si le chemin vers le rétablissement demeure parsemé d’embuches, de multiples lueurs d’espoir pointent à l’horizon pour les personnes aux prises avec ce trouble complexe.