L’addiction au phénomène Fortnite : un fléau moderne qui frappe nos jeunes

Fortnite, le jeu vidéo qui a conquis des millions de joueurs à travers le monde

Sorti en 2017, Fortnite est rapidement devenu l’un des jeux vidéo les plus populaires de la planète. Avec pas moins de 350 millions de joueurs à son actif, il a littéralement envahi les cours de récréation et les chambres de nos adolescents. Le principe est simple : 100 joueurs s’affrontent dans une bataille royale où le dernier survivant remporte la partie. Pour y parvenir, il faut récolter des armes et des matériaux pour construire des structures de protection, le tout dans un univers cartoon plein de couleurs.

Un gameplay accrocheur, des mises à jour fréquentes avec de nouveaux défis, personnages et évènements, le cross-play entre différentes plateformes… Fortnite a tous les ingrédients du succès. Et ça marche : en 2021, le jeu a généré pas moins de 5,8 milliards de dollars de revenus !

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Une addiction dangereuse qui frappe nos jeunes

Mais derrière ce succès phénoménal se cache un revers beaucoup plus sombre. De nombreux psychologues et parents tirent aujourd’hui la sonnette d’alarme : Fortnite provoquerait une addiction dangereuse chez les plus jeunes. Les témoignages de gamins déconnectés du monde réel et uniquement focalisés sur leur écran se multiplient.

Incapables d’arrêter de jouer, ils en oublieraient de manger, dormir ou même se laver. Leurs résultats scolaires s’effondreraient tandis que leur comportement deviendrait de plus en plus violent et agressif, y compris envers leurs proches qui tentent de les raisonner. Bref, une dépendance aussi sévère que des drogues dures comme l’héroïne ou la cocaïne.

Alors, simple phénomène de mode exacerbe ou véritable fléau de santé publique ? On fait le point sans langue de bois sur ce Fortnite qui agite aujourd’hui toutes les consciences.

Le Québec sonne l’alerte et poursuit Epic Games en justice

L’addiction au jeu vidéo n’est pas un phénomène nouveau. Mais avec Fortnite, la tendance s’accélère de façon alarmante, au point que l’OMS a officiellement classé la cyberdépendance comme une maladie en 2018.

Aux Etats-Unis et en Europe, parents et associations commencent à exercer une pression croissante sur les fabricants de jeux. Mais c’est au Québec que le premier pas concret vient d’être franchi : une action collective en justice contre Epic Games, le studio concepteur de Fortnite.

« Le jeu exploite des vulnérabilités psychologiques et neurobiologiques des enfants pour les rendre dépendants, un peu comme le ferait un trafiquant de drogue avec un consommateur », assène Me Jean-Philippe Caron, l’avocat représentant les plaignants. Le but ? Obtenir des dommages et intérêts pour compenser les préjudices subis, mais aussi forcer Epic Games à modifier certaines caractéristiques aggravantes de son jeu.

Alors, méthodes marketing douteuses ou simple procès d’intention infondé ? On analyse sans concession.

Fortnite spécialement conçu pour créer une addiction ?

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Des enfants littéralement « accros » à leur écran

Commençons par étudier de plus près les symptômes rapportés chez ces enfants et adolescents qui passeraient leur vie scotchés à Fortnite. Dans son jugement autorisant l’action collective québécoise, le juge Sylvain Lussier décrit des cas troublants.

Agressivité, langage grossier, négligence de l’hygiène, troubles du sommeil, migraines, douleurs dorsales… La liste des conséquences physiques et psychologiques liées à une surconsommation intensive de Fortnite est longue.

Certains jeunes dépenseraient même des sommes astronomiques sur la carte de crédit de leurs parents pour s’acheter des skins et accessoires en jeu. Quitte à vider leur compte en banque ou celui de papa-maman !

Bref, un niveau de dépendance que l’on retrouve rarement avec un simple « divertissement ». D’où les soupçons sur une possible conception du jeu favorable à l’addiction. Regardons ça de plus près.

Cibler les vulnérabilités psychologiques des plus jeunes

Chez Epic Games, le profil LinkedIn de Cécile Hodent, psychologue spécialisée dans les mécanismes d’addiction, intrigue. Car elle n’est autre que la conceptrice en chef des mécaniques de rétention de Fortnite ! Autrement dit, celle dont le job est de garder les joueurs accros le plus longtemps possible.

Dans son livre « The Gamer Brain », elle détaille justement toutes ses astuces pour exploiter les vulnérabilités psychologiques des joueurs. De quoi crédibiliser les accusations portées contre Fortnite, selon Me Caron : « Le jeu a été pensé de A à Z pour rendre nos enfants dépendants. C’est grave et irresponsable. »

Regardons de plus près les stratégies utilisées.

Stimuler le cerveau… pour mieux l’accrocher

Premier point : la libération de drogues internes dans le cerveau. En jouant à Fortnite, le corps produit en effet des taux élevés de sérotonine, dopamine et adrénaline, procurant une sensation grisante.

Le cerveau fonctionne un peu comme celui d’un drogué qui vient de prendre sa dose. Résultat : impossible de décrocher, on repart pour un tour ! Et quand on arrête, les symptômes de manque surviennent : énervement, agressivité, frustation.

Autre subtilité diabolique : le « renforcement positif », technologie de conditionnement popularisée par les travaux du psychologue Pavlov. Le principe ? Récompenser un joueur chaque fois qu’il accomplit quelque chose pour l’inciter à recommencer.

Sur Fortnite, ça se traduit par des points d’expérience (XP) distribués à chaque kill. Plus on joue, plus on monte en niveau et débloque de nouvelles armes, skins et danses rigolotes. Et ça, aucun ado ne peut y résister !

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Un marketing agressif pour pousser à la consommation

Troisième axe : la pression marketing. En plus du jeu de base gratuit, Fortnite propose toute une panoplie d’achats intégrés pour personnaliser son avatar ou débloquer des objets en tout genre. Une pratique appelée « freemium » consistant à offrir un produit gratuit… pour mieux vendre des options additionnelles.

Sauf que sur Fortnite, les incitations à consommer sont omniprésentes et particulièrement agressives. Promotions limitées dans le temps, réductions alléchantes, battle pass donnant accès à des récompenses exclusives… Difficile pour un cerveau d’ado en construction d’y résister !

Résultat : une étude menée aux Etats-Unis a montré que 69% des joueurs mineurs avaient dépensé de l’argent réel sur Fortnite. Preuve que les techniques marketing fonctionnent parfaitement… quitte à pousser certains dans l’excès.

Un gameplay addictif… par design

Dernier ingrédient : le jeu en lui-même. Avec son univers cartoon joyeux, ses graphismes éclatants et son gameplay nerveux, Fortnite est terriblement addictif à jouer. Une fois la manette en mains, impossible de lâcher avant d’avoir fait une dernière partie… qui en entraîne une autre, puis une troisième.

Pire, le jeu est conçu pour ne jamais vraiment finir ! Battles royales en continu, défis journaliers, missions hebdomadaires, évènements saisonniers… Il se passe toujours quelque chose pour incentiver à se reconnecter.

Cerise sur le gâteau : Fortnite est cross-plateforme. On peut reprendre sa partie solo depuis son PC, sa Playstation, la Switch de son petit frère… autant dire qu’il nous suit partout ! Difficile dans ces conditions de résister à la tentation.

Parents, associations… la riposte s’organise

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Petits joueurs contre géant Epic Games : un combat inégal ?

Entre d’un côté des géants du jeu vidéo disposant de budgets pharaoniques et de l’autre de simples parents démunis, le combat semble inégal. Pourtant, la fronde s’organise. Explications.

Aux Etats-Unis, Epic Games vient d’écoper en décembre 2022 d’une amende record de 520 millions d’euros. Motif : pratiques commerciales trompeuses et défectueuses mesures de protection de la jeunesse sur Fortnite. La justice a donc reconnu les dangers du jeu.

Autre initiative enthousiasmante : l’action collective lancée au Québec pour indemniser des joueurs rendus accros. « C’est désormais à Epic Games de prouver que son jeu n’est pas délibérément addictif », se réjouit Me Caron. Si le studio ne collabore pas, il s’expose à de lourds dédommagements.

Cerise sur le gâteau : l’OMS vient de publier son premier rapport complet sur la dangerosité des jeux vidéo. Verdict ? Ils peuvent bel et bien rendre accro, surtout chez les plus vulnérables. Une base «scientifique» solide pour de futures actions en justice.

La bataille ne fait donc que commencer et la pression monte sur les fabricants de jeux. Pour notre avocat québécois, nul doute que « le vent est en train de tourner ». Affaire à suivre donc…

Vers des jeux vidéo plus éthiques… et plus addictifs ?

Quid alors de l’avenir des jeux « addictifs » comme Fortnite ? Faut-il purement les interdire pour protéger nos chères têtes blondes ? Ce serait bien facile… mais aussi simpliste.

Certes, personne ne défend l’idée de rendre nos enfants «accros» et fragiles psychologiquement. Mais de là à tuer toute une industrie prospère et créatrice d’emplois ? Attention à ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain…

En réalité, personne ne demande l’interdiction des mécaniques rendant un jeu plaisant ou motivant à jouer. Seulement qu’elles respectent des limites éthiques élémentaires. Notamment pour les mineurs, population vulnérable par définition.

La solution ? Des chartes de « bonne conduite » cosignées par les fabricants de jeux sous l’égide de l’OMS. Avec des mesures concrètes : système de vérification d’âge renforcé, limitations claires du temps de jeu pour les moins de 16 ans, boutons « pause » obligatoires…

De quoi concilier business et éthique. Car n’oublions pas : derrière l’industrie du jeu vidéo se cachent aussi des humains passionnés qui bossent dur. Ne crucifions pas Epic Games ou Cécile Hodent trop vite. Et attendons de voir ce que Fortnite devient avec le temps : un divertissement comme un autre ou un fléau de santé publique ? Les jours à venir nous le diront…