Ou comment accepter de traverser les différentes phases d’un processus de changement.
Le Dr Elisabeth Kübler-Ross, psychiatre suisse, propose, dans les années 1970, un modèle détaillant les différents phases traversées émotionnellement en cas de deuil. Ce modèle est inspiré de ses travaux sur des patients en phase terminale d’une maladie. Il est appelé modèle de Kübler-Ross ou modèle des 5 étapes du deuil.
Le deuil d’une personne est un des changements auquel nous pouvons être confrontés dans notre vie. Il en existe d’autres : perte d’un travail, rupture amoureuse, deuil d’un idéal, déménagement…
Je vous propose de détailler les étapes de ces changements… étapes qui sont identiques à celles du deuil. Seul celui qui traverse ces étapes atteint et intègre la dernière – celle de l’acceptation – et poursuit ensuite sa route. Les autres continueront à tourner en rond dans les 3 premières étapes.
Cette traversée et acceptation du changement demande un véritable travail, c’est-à-dire du temps, de la volonté et de l’énergie. Il est important que ce travail se fasse de manière consciente pour pouvoir mettre en mots ce qui se vit émotionnellement (cerveau limbique) et ainsi éviter des nœuds, blocages ou transmission inconsciente à ses descendants (voir les lois de fidélité familiale et les constellations familiales).
Tous les contes initiatiques parlent de cette quête, de cette transformation humaine. Ce sont souvent des enfants qui partent à la recherche d’un trésor, ou de quelque chose de grande valeur, qui devront affronter de nombreux dangers et qui devront faire montre de beaucoup de courage, intelligence, discernement. Souvent, cette quête se fera par amour ou pour sauver quelqu’un.
Exemples :
- Vassilissa qui part chez Babayaga et qui réussit, grâce à sa poupée, à éviter les pièges de la sorcière
- La petite fille qui part chercher un poil de l’ours en haut de la montagne pour en faire une potion afin de sauver sa mère
- …
Quelles sont les étapes du changement?
1ère étape : le déni
C’est une forme de sidération. Je vais faire “comme si” le problème n’existait pas. Il n’est pas vu, pas accepté , pas compris. Tous les autres voient la situation, sauf celui qui en est le sujet. C’est une excellente façon de gagner du temps pour trouver des ressources.
“Je ne veux pas voir car je ne peux pas voir. Je ne veux pas ni ne peut entendre. Je ne fais pas attention à mon ressenti. C’est comme si ça n’existait pas. Je ne suis pas prêt à faire face. Ce serait trop grave ou trop lourd ou trop douloureux. Je pourrai en mourir”.
Le déni est une réaction inconsciente, en réaction à un choc et il permet de gagner du temps pour assimiler le changement douloureux. Il peut aller de quelques secondes à plusieurs semaines. C’est lui qui est à l’œuvre quand, des semaines après la perte d’un proche, nous croyons pendant quelques secondes entendre la voix de celui-ci dans la rue.
Les 2 étapes suivantes se suivent, s’interpénètrent, se vivent simultanément ou en alternance.
2ème étape : la dépression
La dépression est une solution parfaite pour le cerveau pour dépenser le moins d’énergie. Je débranche tous les câbles. Je suis envahie par le manque, la tristesse, l’abattement. Toute l’énergie disparait et je suis incapable de penser et d’agir. Je n’ai plus envie de rien. C’est tout noir. Je n’ai plus d’envie.
Pendant cette phase, le peu d’énergie est consacrée à la survie instant après instant… se lever, aller au boulot, se laver les dents… C’est le moment de pleurer le manque, d’être mal, de s’abandonner à la douleur. C’est une phase tournée vers l’intérieur.
3ème étape : la colère
La colère permet d’autoriser l’énergie et les émotions à s’exprimer vers l’extérieur. Souvent, cette colère est “masquée” ou mal dirigée : contre soi, contre l’autre, contre le conjoint, les enfants, le patron, la société. C’est une colère distordue qui donne une forme à la douleur sans la diriger au bon endroit.
Elle a le mérite de tenter de donner une forme à la douleur vers l’extérieur.
Souvent, dans notre société et principalement pour les femmes, l’expression de la colère est interdite par les injonctions familiales et sociétales. Ainsi, la colère interdite se mue en émotions dites rackets ou émotions secondaires, c’est-à-dire que plutôt que de laisser jaillir la colère vers le dehors, la colère va prendre un forme autre (apathie +++, peur+++, colère contre soi rentrée et silencieuse).
Dépression et colère peuvent alterner, se suivre, faire des allers et retours… Dans le processus de changement, ces allers et retours sont positifs. Ce qui l’est moins, c’est quand soit la dépression, soit la colère prend toute la place. Souvent, c’est le signe qu’une des 2 émotions n’est pas autorisée (injonction familiale, sociétale, exclusion d’une émotion suite à un vécu singulier…).
Quel est le travail à faire pendant ces 3 étapes?
- prendre conscience de “l’étendue du désastre”
- vivre, sentir, visiter toutes les émotions ressenties et mettre de la conscience comme on met de la lumière dans une pièce
La solution inconsciente face à un changement (surtout un changement subi) est de tout fermer, de bloquer, de ne pas voir, de ne rien faire, de faire semblant, de s’agiter ou de vivre par procuration. Une autre solution est l’inverse : aller voir, accepter de ressentir, aller jusqu’au bout des émotions, les accueillir, les comprendre… jusqu’à se sentir en paix avec le changement. Chacun a son rythme, avec sa temporalité. Quand toutes les émotions ont été traversées et reconnues, il n’y a plus de zones d’ombres. Tout est clair, calme et des ressources ont été trouvées. Nous entrons dans la 4ème étape.
4ème étape : l’acceptation, l’intégration
Une nouvelle énergie se met en place qui nous permet de vivre de façon plus libre, plus authentique, plus consciente. Nous retrouvons de l’énergie et nous pouvons repenser au changement sans nous effondrer (ou alors de manière de plus en plus brève).
Ces étapes du changement sont un processus. Elles peuvent se faire sur un temps court pour un changement mineur ou plus long pour un changement majeur pour notre existence. Chacun a sa temporalité et il est important de la respecter tout en naviguant dans les différentes étapes. Si nous sommes figés (donc plus en mouvement), il s’agit le plus souvent d’une émotion qui n’arrive pas à se dire…